A propos de la transe

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Il y a de nombreuses formes de transe*(s).

Dans ma carte du monde, en fait, tout ce que nous vivons est lié à un état de conscience, un ensemble de vibrations qui assemblent le monde tel que nous le vivons, ressentons, percevons. C’est l’ensemble des qualités vibratoires auxquelles nous sommes sensibles qui nous constituent.  Je propose comme point de départ à cet article le final du film whisplash

Ce film relate le parcours extrêmement difficile d’un jeune batteur de Jazz qui fait partie d’un big band mené par un musicien dictateur, qui veut avoir la maîtrise totale de la musique et de ses étudiants. C’est une épreuve de destruction totale du mental, ni dans la joie, ni dans la bonne humeur. Le chef d’orchestre pose une pression psychologique extrême sur cet apprenti, une rigueur implacable pour que celui ci dépasse ses limites en technique, endurance, précision, virtuosité, présence, vitesse …  Dans ce tableau final, le jeune batteur a réussi à être présent pour un concours de big band important. C’est la note finale du concert. Voilà pour le contexte.    

Et là, contre toute attente, Il continue à jouer après la note finale du concert, prends un chorus monumental, de sa propre initiative. Il y dépasse ses propres limites, « tuant » au passage « le Père » ( il le dit : I kill you !). Je trouve intéressant d’observer cette montée en transe, son déroulement et sa gestion. 

Référentiel, paradigme

Tout ce que nous vivons est lié à un état de conscience, un ensemble de vibrations qui assemblent le monde tel que nous le vivons, ressentons, percevons. C’est l’ensemble des qualités vibratoires auxquelles nous sommes sensibles qui nous constitue. Nous sommes un assemblage changeant et mouvant, en transformation (changement de forme), constante. Et c’est ce même ensemble vibratoire qui crée nos filtres de perceptions, à travers nos sens. C’est à dire la façon dont nous percevons le monde, le vivons et expérimentons. Je proposerai ici 6 sens, 6 consciences, comme le propose le bouddhisme tibétain la 6 ème étant la conscience mentale, elle même ayant 3 composantes.

Nous pouvons dire que notre état de conscience du moment est lié à notre dimension vibratoire du moment, qui résulte de composantes extérieures et intérieures. C’est à dire qu’il y a les vibrations et les vibrations-matière (nos cellules assemblées en un corps complexe) qui nous constituent en tant qu’individu, et tout ce qui provient de l’extérieur de cet assemblage. Cependant, observant finement intérieur et extérieur, nous nous apercevons de la perméabilité entre ses deux milieux, voir de l’absence de séparation, c’est à dire la présence d’un continuum. Il n’y a ni dedans, ni dehors, ni intérieur, ni extérieur. Cette conscience est liée à des qualités vibratoires. Il n’y a même ni intérieur, ni non-intérieur, ni extérieur-ni non extérieur.

La transe naît avant tout dans un contexte spécifique, ici de tension, de challenge, de relation entre un maître et son élève. Le contexte conditionne en grande partie la montée en transe. Soit le contexte extérieur, soit le contexte intérieur et de toutes façons la rencontre des énergies intérieures/extérieures ou intérieures/intérieures, ce qui est la même chose en fait, c’est un écho, un reflet. Ici le contexte est particulier. On peut le comparer à un rituel

Il y a un contexte et un déclencheur. Evidemment, il n’y a pas de séparation entre les événements. Dans le film, nous le voyons, la vie de ce jeune batteur est un continuum, une série de choix, de contraintes et une volonté, sa volonté, celle de son âme dirions nous, à la fois en lutte et en alliance avec son maître de musique. La final de ce film est un élément dans son scénario de Vie … C’est à la fin du concert, alors que la dernière note a sonné, que soudainement le batteur  » saisit  » sa chance. Le rituel est a priori terminé mais c’est à ce moment que le rite de libération commence et se joue, pour le jeune batteur. Dans un état de conscience particulier (un concert nous plonge toujours dans un état vibratoire spécifique), le batteur décide de continuer et de jouer son chorus, son solo. On ne sait pas quelle partie de lui décide … on s’en fout d’ailleurs, c’est une impulsion, son être qui ne demande qu’à Vivre et Jouer. A l’extrême limite (en terme de temps, le concert étant terminé), il se relance et joue. On peut dire que le déclencheur est la dernière note du concert … et il y en a bien d’autres lorsqu’on regarde le film dans sa totalité. Cette note finale est son point de départ. Il s’y engage alors totalement, comme lui a enseigné (et en saigné) son professeur de musique. L’enjeu est colossal ici : il prend la maîtrise du concert, et de sa Vie. Sans la présence du chef d’orchestre, point de rituel dans ce final, point de dépassement. 

Il y a une tension interne, qui va être alimentée par la présence du chef d’orchestre. Cette tension dynamise le potentiel du jeune batteur. Dans une première partie de ce final, rapidement, le batteur « part en transe », il joue et surjoue, poussant (on le sait par rapport au déroulement du film) ses limites. Le chef d’orchestre n’a aucune prise sur lui à ce moment. Puis celui-ci reste devant le batteur. Et peu à peu le « reconnait » c’est là qu’il souhaitait le mener … Il reste face à lui, et « reprends la main » sur son étudiant, n’étant plus dans l’affrontement, acceptant et reconnaissant ce qui est, (sans être en alliance angélique !), il se pose face à lui et va pouvoir maîtriser la transe du jeune batteur, du regard, de sa présence et de son geste. Il l’accompagne, se collant à l’énergie de la transe, qu’il connaît, épouse cette transe qui est le reflet de l’énergie qu’il avait mise en place depuis des mois. Puis, de l’intérieur,  il l’apaise et la fait remonter. Il la guide et canalise, reprenant donc la conduite de l’orchestre, jusqu’au final. D’esprit à esprit, d’énergie à énergie les deux êtres et personnalités sont en alliance à ce moment. On voit que le regard du chef d’orchestre se transforme. Si l’on refait le parallèle avec un rituel, la présence de l’enseignant est encore une fois pour ce contexte fondamentale. Il peut « calmer » ou canaliser l’énergie du jeune batteur, ici parce que c’est la fin de leur conflit.

Commentaires

Ce film n’est évidemment pas mon modèle de pédagogie, de rituel et de soins. Cela étant, on y repère la structure ( je ne parle pas de la forme) de rituels de guérison, ou de soins (chamanique ou non). Dans le film, nous sommes dans un contexte musical, et le rituel fonctionne tout aussi bien. A certains moments dans un processus de soin (ou dans la vie ordinaire, qui est une transe aussi), nous pouvons être confronté à une telle situation (laquelle est ici volontairement vécue par le batteur, je parle du final). Dans un contexte de stage, je ne conseille évidemment pas cette approche maître-disciple violente. Concernant la transe, qui est perçue comme un état à atteindre, je poserais quelques mots : on peut rester conscient dans la transe. C’est à dire que notre taux vibratoire change, notre conscience se déplace et se replace sur une autre champs perceptuel et vibratoire. Souvent les candidat(e)s à la transe cherchent le lâcher prise. souvent cela signifie lâcher prise du mental. Pour ma part, je préconise plutôt d’observer que notre conscience peut se placer autrement, au service de ce nouvel état vibratoire. Effectivement, le plan de conscience habituel, ordinaire (ordinaire et habituel pour la personne en question) n’est plus présent à ce moment. (encore que l’on puisse faire des aller-retour).

Processus de transe

D’autre part concernant le processus de transe il est, nous l’avons vu, alimenté par l’intérieur de la personne ou/et par son environnement. Une fois que le processus est en cours, il est bon de la laisser vivre son rythme et ses phases, il y a généralement une régulation naturelle. Cela étant, quand la transe est installée dans un stage proposé par une personne, celle-ci conserve sa responsabilité dans la gestion du processus. Il est sensé avoir une expérience des transes, de la gestion du groupe (si c’est en groupe) et des personnes chacune pour ce qu’elle est. Il doit donc pouvoir canaliser une transe ou la laisser libre. La simple présence d’une personne fait que de toutes façons elle participe à la transe d’une tierce personne. Nous le savons, un observateur change le système qu’il observe, même si il reste neutre. Ce film met l’accent sur un aspect de la gestion de la transe par le participant lui-même ou par une autre personne. Le participant conserve sa responsabilité aussi, cependant lors d’une transe, il peut arriver que le groupe ou l’accompagnant principal doive assurer la sécurité de la personne en transe.Je ne parle pas ici des transes de possession.

A certains moments, et c’est là que l’expérience ou l’expertise de l’animateur ou animatrice du stage ou de la session de transe est importante, la personne pourrait se mettre en réel danger, physique, mental ou spirituel. Le cadre et le contexte seront donc évalués et sécurisés « autant que faire se peut » et la transe peut être adoucie, légèrement freinée ou relancée. Cela peut s’effectuer de multiples manières ; de toutes façons par la présence et l’attention. Porté par un intention de coeur, bienveillante pour autrui, on ne conduit une transe que dans le respect de la personne et de son entourage. D’autre part, la transe est souvent perçue comme un moyen d’évasion hors du corps, hors de ce monde, sans but … une forme d’errance. Pour quoi pas : l’errance peut être un état transitoire dont nous avons besoin à un moment. 

Et ce n’est pas ce qui m’apparaît indiqué pour tous et toutes. Nous sommes dans une expérience terrestre, dans laquelle le corps est un constituant important, à l’égale de l’esprit. Sans corps, l’expérience terrestre n’est plus « humaine », sans esprit conscient incarné non plus. Certains participants vont vivre l’expérience de la transe dans leur chair, dans la mémoire de chaque cellule concernée. Au creux et au plein de leur matière première. Révélant des pans de l’histoire, passée, présente ou future.  D’autre personnes effectueront des voyages de l’esprit, dans d’autre mondes. Dans ce cas, il est utile de savoir guider les personnes sur le chemin du retour si elles ne le connaisse pas et de toutes façons de donner les clefs ce cette autonomie aux participants. Il est également utile de pouvoir rapporter les ressources de ces voyages spirituels afin que le participant puisse en incorporer les éléments utiles dans leur vie – quotidienne notamment. On peut rapporter des ressources en énergie de nos voyages spirituels.

La personne qui conduit saura donc s’assurer de l’ancrage des participantes et participants et réguler son interaction avec chacune et chacun. Certaines transes demandent à être prolongées et relancées plusieurs fois, d’autres non. Dans l’apparence, une transe peut sembler terminée, alors qu’elle continue à l’intérieur, sur un plan de conscience ou de matière. Elle ne doit pas être arrêtée à ce moment. Une transe ne doit pas être arrêtée brutalement, trop rapidement.La présence va être aidante et canalisante. Présence du groupe, du cercle et aussi de la personne qui propose la session. Les médias utilisés vont être aidants aussi, voir nécessaires à la transe : tambours et la variété de leurs rythmes et sons, danse, chant … Et la volonté ou l’intention de se prêter à la transe. Si elle ne veut pas, elle ne pourra pas y accéder. Et ce choix sera respecté. C’est important aussi.

*nous pourrions remplacer « transe » par « rêve »

Vous trouverez dans mon livre un chapitre concernant la transe, dans le contexte des Cercles de Tambours et soins, notamment ceux que j’anime depuis 16 années.

Avez vous un avis sur cet article ? Des commentaires … des témoignages ?  N’hésitez pas !  Alain D   sirealadin@gmail.com

 

Article écrit et publié par Alain Désir le 28 Mai 2018   site  www.cercles-de-tambours.com

A propos du copyright. Cet article est déposé. Si vous l’utilisez, merci d’en citer intégralement la source. Chaleureusement  Alain Désir

 

 

 

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